lundi 22 septembre 2008

G. Zapolska à Paris

Debout comme des jeux de cartes, comme des jouets d'enfant posés sur le sol, les maisons de la banlieue de Paris défilaient devant les yeux de Janka. Le train, haletant comme une bête, avançait comme pour arriver vers son gîte. Il était en retard et fonçait devant lui, avec un grondement et le fracas de ses roues.

De deux côtés de la voie suivie par le train, des rails couleur rouille, des pylônes qui défilaient verticalement, aux lampes tantôt allumées, tantôt non, rouges ou vertes, et des murs qui s'élèvaient, gris, hauts, largement recouverts d'affiches au fond bleu, rouge, et jaune, pour de la réclame. Derrière tout cet arc-en-ciel de couleurs, des maisons qui montaient parfois vers le haut, masse blanche rincée par la pluie, parfois s'affalaient au plus près du sol ; et, dans le lointain, on voyait la dentelle de milliers de cheminées dressées.

Brûlant de fièvre, Janka avait appuyé son visage sur des barres du wagon et, à travers la vitre levée, absorbait en elle ces images, ces surfaces carrées dont les tonalités brunâtres envahissaient les rebords du défilé.

"Géraudel !" "Géraudel !" - lisait-elle de façon répétée. [...] Au milieu de cet amas de réclame, le train s'est mis à crisser, à gémir et il s'est engouffré de façon impétueuse sous la verrière d'un toit soutenu par des poutrelles grises, froides, sans style. Pareils à des animaux devant leur mangeoire, des trains au corps roussâtre étaient alignés, qui attendaient l'heure du départ.

C'est ainsi que, sous les traits de Janka, Gabriela Zapolska décrit son arrivée à Paris par le train venant de Varsovie.

Nous sommes à la fin du 19ème siècle, en 1889. L'Exposition Universelle bat son plein, La Tour Eiffel vient d'ouvrir ses portes au public. Jeune femme polonaise, Zapolska a 32 ans.

Traduction-adaptation par Luna et Arturo.
Tableau de Claude Monet.

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